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HENRI FAURES

(1865-1930)

 
M. Henry Faurès, notaire à Courthézon est décédé en cette ville, Dimanche 9 Mars, à 4 heures, après une courte maladie.
Son décès est un deuil public pour Courthézon où son action a été grande dans toutes les oeuvres religieuses, sociales, patriotiques et où il laisse d'unanimes sympathies.
On l'a bien vu le mardi suivant. Ses obsèques ont eu lieu au milieu d'un immense concours de population venu pour apporter au regretté défunt et à sa famille de respectueux hommages de reconnaissance et de condoléances. On peut dire que le pays tout entier a voulu lui faire cortège. De très nombreux amis et des personnalités s'y sont joints.
A l'issue de la messe célébrée par M. l'abbé Fourmon, curé de Courthézon, M. le Vicaire Général Luquin, délégué spécialement par Monseigneur l'Archevèque absent d'Avignon, a donné lecture d'une très belle lettre de S. G. Mgr. de Llobet qui honorait d'une particulière amitié celui qui fut naguére son condisciple et qu'il avait retrouvé au premier rang des hommes d'oeuvres de son Diocèse d'Avignon.
Au cimetière des discours ont été prononcés par M. le Maire de Courthézon au nom de la Municipalité, du Conseil Municipal et de la Ville, par M. Th. Arnaud, au nom des amis du défunt, par Me Vincenti, au nom des notaires et enfin par M. Henri Goubet, avocat, au nom de la Ligue des Catholique du Vaucluse et des Oeuvres Diocésaines.
Nous publions ci-après les discours qui retracent la vie de notre très cher et très regretté défunt.

 

LETTRE DE MONSEIGNEUR L'ARCHEVÊQUE D'AVIGNON (1)

Monsieur le Curé,
Il ne faut rien moins que mon absence de diocèse pour me tenir, ce matin, loin du deuil qui frappe une honorable famille et, avec elle, la paroisse de Courthézon. Deuil public, tristesse unanime que celle qui rassemble toute la population autour de la dépouille mortelle du très regretté Monsieur Henri Faurès.
Regrets pour cette affection loyale et sûre qui lui conquérait tous ceux qui l'approchaient, regrets pour cette charité dont les Anges seuls savent la bienfaisance, regrets pour ces conseils où se livrait l'élévation de sa conscience, regrets pour l'example d'une vie dont on admire à la fois la droiture et l'invariable unité.
Une vie se juge à ses oeuvres; les actes qui ont rempli, bien rempli l'existence de Monsieur Faurès procédaient d'une foi enracinée, réfléchie, pleinement acceptée.
En se penchant sur son cercueil, les affections les plus tendres peuvent se dire qu'il n'a point démenti leur sang ou leur confiance, mais qu'au contraire, il a hautement honoré son nom, ainsi que les fonctions qu'il a remplies.
En cette église qui toujours lui fut si chère, dans ce sanctuaire où sa place jamais ne restait vide il convient que nos prières s'adressent, fidèles et ferventes, à Dieu qu'il a si bien aimé, si bien servi et vers qui, courageusement, son âme s'en est allée.
Mieux que nos condoléances, que tous ceux qui le pleurent, mère, épouse, frères affectionnés, trouvent dans sa mémoire des raisons d'espérance surnaturelles.
Que ce soit en élevant nos regards vers la Croix, vers le Ciel, que tous nous aimions à nous souvenir du juste, du fidèle, au vrai sens du mot, qui vient de s'endormir dans le Seigneur.
GABRIEL
Archevèque d'Avignon

 
DISCOURS DE M. ONDE
Maire de Courtézon
Mesdames, Messieurs,
Avant que cette tombe ne se referme, je viens, au nom de la population de Courtézon, saluer une dernière fois l'homme intègre, l'homme de bien, qui manquera désormais non seulement à sa famille, mais à tous ceux qui l'ont approché.
M. Henri Faurès était parmi nous depuis quarante ans et il avait continué dans Courthézon les traditions d'honneur et de devoir de la famille Masson.
L'estime dont l'entouraient ses pairs, la confiance que lui témoignait la population sont la preuve la plus palpable de son mérite, de son esprit de justice, de sa bienveillance et de l'autorité morale dont il était investi.
Tous les clients de son étude, comme tous ceux qui l'ont secondé dans son apostolat pour les oeuvres de solidarité et de défense agricole, savaient combien chez lui tout était affabilité, dévouement, discrétion.
Il joignait à son esprit de conciliation tout le tact et les sentiments de tolérence qui empêchent les susceptibilités et aplanissent les discussions.
On peut dire qu'il fut l'initiateur, l'inspirateur de toutes les oeuvres de progrès dont sont pourvus les agriculteurs de Courthézon. La Cave coopérative, les Associations mutuelles pour l'assurance contre l'incendie et les accidents, le Syndicat d'appellation d'origine, la Mutuelle agricole pour les Assurances sociales, l'administration du Syndicat des Thor et Paluds, tout cela constitue l'oeuvre de M. Faurès.
S'il possédait à un haut degré les qualités du parfait notaire, on doit dire qu'il fut aussi un parfait citoyen, aimant son pays d'adoption et lui apportant toutes les ressources de sa belle intelligence et de son dévouement absolu.
A la déclaration de guerre, son âge lui permettait de rester chez lui, mais il ne craignit pas, malgré sa santé précaire, à reprendre du service comme officier d'artillerie.
Cher Monsieur Faurès. En adressant aux vôtres nos respectueux sentiments de condoléances, j'ajouterai que nous n'oublierons jamais les éminents services que vous avez rendu à notre pays et qui sont dignes de notre reconnaissance.
Dormer en paix, dans la sérénité que donne le devoir pleinement accompli. Votre carrière noblement remplie nous servira d'exemple. C'est le moyen de donner à notre pays un regain de force et de rendre autour de nous, selon votre désir, la vie plus belle, plus fraternelle et meilleure.
Cher Monsieur Faurès, adieu !

 
DISCOURS DE M. Th. ARNAUD
Mesdames, Messieurs,
Comme ami intime du regretté défunt, j'ai le devoir de rappeler en quelques mots ce que fut M. Henri Faurès.
Il fut le digne successeur de son beau-père M. Masson, notaire intègre comme lui, et le continuateur de ses oeuvres.
Lorsque la guerre éclata, quoique atteint par la limite d'âge et son état de santé déjà maladif, n'écoutant que son ardent patriotisme et sa puissance de volonté, il s'engagea comme lieutenant dans la cavalerie, mais, bientôt après ses foeces le trahirent et à son regret il dut retourner dans ses foyers pour rétablir sa santé ébranlée.
C'est lui qui créa l'Association Philantropique, dont le but était de grouper toutes les bonnes volontés pour venir en aide à nos écoles libres, à ces chères écoles libres qu'il aimait tant et qu'il a protégées par la parole et par sa bourse jusqu'à sa dernière heure.
C'est lui aussi qui créa dans notre commune des oeuvres aujourd'hui florissantes, j'ai nommé la "Caisse locale de Crédit Agricole Mutuel, la Mutuelles Agricole Incendie et la Mutuelle Agricole Accident", toutes ces oeuvres perpétueront la mémoire de ce grand philanthrope. Lors de la construction de la Cave coopérative, il prouva une fois de plus sa générosité en faisant cadeau de ses honoraires qui s'élevaient à plus de deux mille francs.
C'est une belle et noble figure qui disparaît. M. Faurès était l'ami et le conseil éclairé de tous ceux qui faisaient appel à sa bonne volonté, à son dévouement et à sa compétence.
Quoique de condition différente, il aimait à se retrouver chaque dimanche avec ses amis intimes, les Marquis, Pradel, Courtil et moi-même, nous étions très honorés de la grande affection qu'il nous témoignait. Ah ! avec lui, la conversation ne languissait jamais, il était le boute-en-train d notre petit groupe; aussi dimanche dernier étions-nous consternés, comme frappés de stupeur et presque sans paroles par le vide immense que sa mort avait causé parmi nous.
Il célébra dernièrement le quarantième anniversaire de son mariage, fête toute intime mais rehaussée par la présence de notre éminent archevêque Monseigneur de Llobet, qui est venu le voir une seconde fois sur son lit de douleur pour apporter à ce grand catholique les consolations de son saint ministère.
Puisque les témoingnages de sympathie adoucissent la douleur, ces témoignages sont ici unanimes depuis les plus petits jusqu'aux plus grands et au nom de ses nombreux amis, j'adresse à Madame Faurès, à Mademoiselle Moulin, aux familles Faurès, Masson, Masquin et de Bonamaison l'expression de mes bien vives condoléances.
Monsieur Faurès était de ceux qui comme tous les bons catholiques, croient avec raison à l'immortalité de l'âme, aussi, à cet ami fidèle, à ce coeur loyal et généreux, je ne dis pas adieu mais au revoir.

 
DISCOURS DE M. VINCENTI
Notaire à Avignon
Mesdames, Messieurs,
C'est avec la plus douloureuse émotion que je viens, au nom de la Chambre des Notaires de Caucluse, et de tous nos Confrères du département, rendre un dernier hommage à Me Faurès, et exprimer à sa veuve, à ses parents, à ses amis, à tous ceux qui le pleurent, tous les regrets qu'il laisse parmi nous.
Ces regrets sont sincères et profonds, car nous perdons en Me Faurès non seulement un notaire distingué, consciencieux, doué de toutes les qualités professionnelles désirables, mais encore un confrère dévoué, de rapports agréables, conciliants, et toujours prêt à aplanir les difficultés.
Personnellement, pendant les vingt-cinq ans de son exercice, j'ai entretenu avec lui les plus cordiales relations; je le considérais comme un ami, c'est vous dire que je m'associe de tout coeur au deuil de tous les siens.
Me Faurès avait fait ses premiers débuts dans la carrière notariale, et son stage, à Toulouse, dans l'étude et sous la direction d'un notarie éminent : Me Lanzac. Il avait gardé précieusement le souvenir de ses enseignements; il parlait souvent de lui, et toujours avec vénération, et pendant toute sa carrière, il sut mettre en pratique les sages leçons qu'il en avait reçues.
Il succéda à son beau-père, Me Masson, le 26 octobre 1905.
Nommé moi-même notaire quelques années avant Me Faurès, j'ai connu Me Masson, j'ai pu l'apprécier, et je croirais manquer à mon devoir de ne pas rappeler ici, pour honorer sa mémoire, qu'il fut un homme intègre, un notaire accompli, aimé et estimé de tous.
Me Faurès en a été le digne successeur
Au cours de sa carrière, il est toujours demeuré fidèle aux principes de droiture et de loyauté en honneur dans notre corporation.
Ses capacités professionnelles, sa franchise, son affabilité, la délicatesse de ses sentiments, lui avaient gagné l'estime et la sympathie de tous ses collègues, aussi, à plusieurs reprises, fut-il appelé à faire partie de ka Chambre de Discipline, soit comme Membre, soit même comme Président.
Il occupa ces diverses fonctions toujours avec tact, distinction, et à la satisfaction de tous.
Tous ceux qui l'ont connu ont apprécié la sûrreté de son jugement, la sagesse de ses conseils, l'étendus de ses connaissances juridiques et son expérience avisée.
Il se faisait, à juste titre, une haute idée de notre profession; il faut toujours l'ami dévoué et le conseiller éclairé des familles, apportant dans le règlement des conflits d'intérêts l'impartialité la plus grande, le tact le plus délicat, le désintéressement le plus complet.
Il fut, en un mot, un parfait notaire, et fit le plus grand honneur à notre corporation.
Fidèle aux convictions religieuses qui furent la règle de toute sa vie, il nous laisse le bel exemple d'une carrière pleine de dévouement et toujours dominé par le sentiment du devoir et de l'honneur.
Aussi, son souvenir restera-t-il toujours vivant parmi nous.
Que sa veuve, ses parents, ses nombreux amis, dont nous comprenons et partageons la douleur, veuillent bien accepter l'hommage de nos sympathiques et bien vives condoléances.

DISCOURS DE M. GOUBET
Avocat à Avignon
 
On dit souvent aujourd'hui que nul n'est irremplaçable et que personne n'est indispensable. Comment ne pas sentir l'injustice et la vanité de tels propos quand, au lendemain de la mort de notre cher ami Faurès, nous voyons la place prépondérante qu'il tenait dans les oeuvres et que nous constatons déjà l'étendue de la perte vraiment irréparable que nous faisons en lui ?
Faurès était de ceux qui tiennent une place - et de premier plan - de ceux aussi qui la méritent et l'honorent.
Il avait, certes, d'éminentes qualités, de l'esprit et du coeur : la vive intelligence, la culture solide aidée d'un clair bon sens, allant droit aux solutions justes, aux décisions nécessaires, l'aménité, la courtoisie, la cordialité des relation, une éducation parfaite le mettant partout à l'aise et lui conciliant toutes les sympathies, la dignité de vie qui le faisait respecter de tous.
Ces dons si précieux et si rares, il les avait encore perfectionnés par des convictions raisonnées, la pratique assidue et publique de ses devoirs religieux et sociaux. Bien vite il avait acquis cette qualité souveraine qui n'appartient qu'à l'élite : l'autorité. Il était vraiment un chef.
Sa discrétion, sa modestie peut-on dire, en tempérait toutefois les actes. Dans les conseils, il savait faire prévaloir ses avis sans en imposer la rigeur. Il aimait convaincre, plutôt que commander. Sa souplesse, mieux encore que sa volonté, lui donnait gain de cause.
Mais il ne transigeait jamais, du moins sur les principes. Sa droiture, sa fidélité à ses convictions, un sens très avreti u bien public le tenaient éloigné des compromissions, comme des marchandages.
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Il aurait pu avoir toutes les ambitions, il préféra s'en tenir aux oeuvres. Tendrement attaché à son foyer familial, dirigeant avec une rare distinction sa charge de notaire, il trouvait dans les oeuvres religieuses et sociales une action praticulièrement féconde, un rôle magnifique à remplir. Vous savez combien il y excella.
Bien avant que l'Action Catholique ne fut porposée aux laïques par les directives du Souverain Pontifes et des Evêques et ne reçut l'impulsion de la F. N. C. et de ses chefs, Faurès avait compris et, naturellement, réalisé ce devoir de notre époque. Soit au Conseil Paroissial, soit au Comité des Ecoles et des Patronages, dans les Associations et les Groupements il apportait la discipline de l'organisation et du fonctionnement, il faisait prévaloir sans peine toutes les mesures propres à assurer les droits de Dieu, les libertés de l'Eglise, le bien de sa chère cité courthézonnaise et de la grande Patrie qui lui tenaient tant à coeur.
Le rayonnement de son action s'étendait bien au-delà de la commune ou de la paroisse. Son expérience, les services rendus, les résultats acquis, la sûreté de sa doctrine, la justesse de ses vues faisaient de lui un conseiller des plus appréciés et constamment suivi. Son influence a pu s'exercer en bien des circonstances sur les plus multiples objets et plus spécialement dans les questions agricoles ou les problèmes économiques et sociaux. Rien de ce qui concernait son pays et ses concitoyens ne lui demeurait étranger.
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Tout à coup en pleine activité la maladie l'étreint et brusquement l'abat.
Il vu venir la mort. Il a senti toute l'étendue du sacrifice qu'il fallait consentir de ses chères affections familiales, des intérêts dont il avait la charge, des oeuvres dont il était l'animateur, des amitiés nouées en ce pays qu'il aimait comme le sien. Le sacrifice il l'a fait, dévotement, pieusement. Il avait trop vécu en chrétien pour ne pas mourir comme il avait vécu.
Hélas, aujourd'hui, il manque à tout, il manque aussi à tous...
Mais dans la liturgie des Morts l'Eglise nous rappelle les paroles de l'Apôtre : "Ne vous contristez pas, comme ceux qui n'ont point d'espérance."
Ah ! Certes, notre douleur est grande de voir disparaître celui qui a tant de titres à notre affection et à notre reconnaissance. Nous connaissons l'immensité de la perte que font les siens, ses amis, son pays et ses oeuvres. Mais nous savons qu'il ne meurt âs tout entier. Il laisse ici l'empreinte vigoureuse de son action et d'inoubliables exemples qui seront suivis. Il devient auprès de Dieu un actif intercesseus pour tout ce qu'il a si bien aimé, servi ou dirigé.
En nous inclinant, à notre tour, dans un sentiment de résignation, mais aussi d'espérance et de foi, nous apportons à notre ami le suprême hommage qui lui est dû, celui-là du moins pour lequel il a vécu.




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